LAURENT WAUQUIEZ SAISI PAR L’HYBRIS

Laurent Wauquiez, devant un public d’étudiants, a confié que, devant micros et caméras, il ne disait que des “conneries” mais que dans tout autre cadre, il était sincère. C’est alors que – entre (beaucoup) d’autres – il a traité les députés de la majorité de guignols pétrifiés dans l’attitude godillot et déclaré que de ce fait la France était maintenant une dictature ; il a affirmé par ailleurs que Macron et ses équipes auraient largement contribué à mettre en place la cellule de démolition contre François Fillon lors de la présidentielle, et enfin que Nicolas Sarkozy mettait sur écoute tous les membres du gouvernement pendant le conseil des ministres.

Ces propos ayant été rendus publics, L.W. s’est défendu en les revendiquant hautement, arguant même qu’un élu devrait avoir le droit de dire tout ce qu’il a dit et enfin en affirmant qu’il n’avait fait qu’exposer ses convictions, tant et si bien qu’il refusait de s’excuser – sauf auprès de Nicolas Sarkozy, démarche qu’il avait déjà effectuée en bonne et due forme.

Examinons.

Que certains députés sont des guignols : une conviction ?

Que la France est une dictature : une conviction ?

Que Macron aurait conspiré contre Fillon : une conviction ?

Que Sarkozy faisait espionner ses ministres : une conviction ?

Le premier point est un jugement de valeur ; le deuxième est une analyse politique ; le troisième est la dénonciation d’un complot ; la quatrième est une accusation – les quatre sont des attaques ad hominem. Dans tout cela, aucune conviction : dans les points un, trois et quatre, seulement l’expression de la Haine et la formulation de certaines croyances ; quant au point deux, le mot dictature ne manque pas de surprendre car L. W., bien que représentant l’opposition, n’a pas été muselé, arrêté, jeté en prison, n’a pas vu sa famille menacée, etc.

Alors, que s’est-il passé ?

C’est simple.

L. W. est dévoré de Désir : ses ambitions présidentielles sont affichées. Lui aussi fait de la société française un Sytème, et il en vise le sommet ; lui aussi désire être calife à la place du calife. Par ailleurs, il a été élu, et bien élu, à la tête de LR. Fort de ce succès, il se voit – et s’admire, et s’adore – au sommet du Système qu’est son parti. À partir de là, perché sur cette hauteur, il estime être en mesure de défier E. Macron siégeant au sommet du Système France, et surtout pouvoir dire tout ce qu’il désire, c’est-à-dire n’importe quoi.

En d’autres termes, il a été pris de ce vertige des hauteurs du Système que les Grecs appelaient l’hybris.

Mais tout a son revers. Le Pouvoir a son symétrique qui est son jumeau inverse : la soumission ; la hauteur a son symétrique qui est sa jumelle inverse : la bassesse. Quant à celle-ci, L. W. en a donné une belle démonstration : redoutant l’excommunication, il est allé à Canossa se présenter devant Sarkozy. Là où il aurait dû faire un démenti public au sujet de ses accusations, il est allé embrasser les genoux sinon lécher les pieds de son Dominant – lequel a dû bien jubiler, si ce n’est jouir sur place, de voir son Dominé s’aplatir au pied de sa Verticale et réclamer même peut-être son talon sur la nuque. Le bruit a couru que Sarkozy lui aurait exprimé son mépris : vrai ou non, le bruit reflète une vérité, celle du sentiment qu’inspire un tel comportement.

L. W. ou le grand Comparse à la parka rouge…

 

(PS qui a tout à voir. — Avec G.W Bush, je m’étais dit que le fond était atteint ; c’était faux : il y avait pire — Trump. Avec Chirac je m’étais dit que le fond était atteint ; c’était faux : il y avait pire — Sarkozy. Je ne peux pas me dire qu’avec Sarkorzy, le fond a été atteint ; je dois admettre qu’il peut toujours y avoir pire, et ce pire pourrait s’appeler L.W. Mais c’est déjà l’élire…)

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